La direction prise par les participants à l’opération de santé publique britannique, Stoptober, devrait inciter les dirigeants européens à se pencher vers une politique de santé publique coordonnée, axée sur des bénéfices sanitaires optimums. Cette année, en ciblant l’événement sur la réduction des risques (« harm reduction »), les organisateurs se veulent toujours plus pragmatiques et efficaces.
Le succès du Stoptober en Angleterre est impressionnant : après 5 années d’existence, cette initiative est suivie par 10% des fumeurs britanniques, qui arrêtent de fumer pendant un mois… et dont les chances d’arrêter définitivement sont cinq fois supérieures à la moyenne !
Cette opération de prévention est pourtant très simple. Elle propose aux britanniques de ne pas fumer pendant tout le mois d’octobre. Stoptober a été conçu et mis en place par le ministère de la Santé, mais ce mouvement doit surtout sa force à l’implication, aux côtés de la sécurité sociale anglaise (NHS) et des cliniciens, des associations de lutte contre le tabagisme : ASH UK, le UK Cancer Research, le Royal College of Physicians, et le Centre d’Etude du Tabac et de l’Alcool britannique. Les non-fumeurs sont également investis durant ce mois où toute l’Angleterre lutte contre le tabac : amis, collègues, famille, réseaux sociaux, travail d’équipes entre fumeurs qui se soutiennent mutuellement…
Les explications d’un tel succès sont simples. Au-delà de l’unité de tout un pays, un message clair porté simultanément par la totalité des acteurs de ce combat : concernant les politiques de santé publique, seuls les résultats et les vies sauvées comptent, pas les grands principes.
En Europe, la lutte contre le tabac divise, entre une approche pragmatique anglo-saxonne, qui vise à déculpabiliser les fumeurs et à les accompagner vers la fin du tabagisme ; et une méthode plus brutale, pratiquée notamment en France, qui consiste à les toucher au porte-monnaie en augmentant continuellement le prix du paquet. Et ce malgré des résultats souvent moins probants.
Par exemple, sur le même sujet, en France, les messages contradictoires sont tellement nombreux que les consommateurs ne savent même plus que les alternatives au tabac sont bien moins nocives pour la santé que le fait de fumer. Car si la nicotine est évidemment une substance nocive, ce n’est rien comparé aux dizaines de substances cancérigènes avalées ans la fumée de combustion d’une cigarette. D’où la nécessité de favoriser les produits nicotinés sans fumée.
Le consensus national britannique autour d’une approche de « « harm reduction » explique le succès du mouvement. Il va donc au-delà du combat contre le tabagisme, puisqu’il concerne la stratégie à adopter. En effet, cette année, les acteurs ont réussi à aller encore plus loin dans cette approche, qui pourrait se résumer ainsi : des objectifs réalistes, pour une efficacité maximum. Ainsi, pendant cette opération, tous les substituts de tabac (tabac à priser, e-cigarette, patchs, gommes…) sont offerts gratuitement aux fumeurs qui essayent d’arrêter pendant le mois d’octobre.
Si l’exemple de Stoptober est marquant et particulièrement instructif sur le besoin d‘unité lors de campagnes de prévention, il illustre aussi les divergences européennes sur le sujet de la lutte contre le tabagisme. Pourtant, au-delà du tabac, ce besoin d’unité et cette optique de « harm reduction » sont valables pour tous les autres sujets : obésité, alcoolisme, lutte contre la drogue, binge drinking… De grandes campagnes coordonnées et unifiées à l’échelle européenne pourraient sauver de nombreuses vies, si elles soutiennent et apportent des solutions concrètes aux populations à sensibiliser, au lieu de les punir et stigmatiser.
A l’heure ou l’Union européenne est attaquée et alors qu’on lui reproche de n’avoir qu’un sens économique, ce genre d’initiative permettrait aussi d’affermir les liens entre les états et les citoyens européens.
C’est aussi ça le sens de la construction européenne.
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