Le sort de l’assassin présumé de Brian Thompson, PDG du groupe d’assurance-santé UnitedHealth Group, a suscité des paris sur les marchés prédictifs, testant les limites de la réglementation autour de ces marchés en plein essor.
Les questions étaient variées, mais avec le même personnage central : Luigi Mangione. Ce jeune de 27 ans soupçonné d’avoir abattu de sang-froid, par trois balles, en plein cœur de Manhattan, le 4 décembre 2024, Brian Thompson, patron de la compagnie d’assurance-santé américaine UnitedHealth Group, était au cœur des paris il y a quelques semaines.
Son nom figurait en effet en bonne des places des paris sur les marchés prédictifs. Autrement dit, ces plateformes assimilables à une bourse où il est possible de parier son argent sur n’importe quel type d’événements à venir dans le monde.
À l’instar de Polymarket – la plus célèbre d’entre elles –, ces places de marchés connaissent un regain d’intérêt, notamment aux États-Unis, où l’issue de l’élection présidentielle du 5 novembre 2024 – remportée par Donald Trump –, y a connu une place de choix ces derniers mois.
On pouvait ainsi voir apparaître sur Kalshi, un autre de ces sites, basé à New York, une semaine après le forfait présumé de Mangione, une série de contrats permettant aux traders particuliers de spéculer sur différents aspects de l’affaire.
Les paris macabres de la finance numérique
« Luigi Mangione plaidera-t-il coupable de meurtre ?« , « Luigi Mangione sera-t-il extradé à New York ?« , « Luigi Mangione ou un membre de sa famille avait-il une assurance UnitedHealthcare ? » ou encore « Luigi Mangione a-t-il agi seul ? » étaient entre autres thèmes de paris possibles.
Une initiative pour le moins problématique, au regard même de l’affaire : le meurtre en pleine rue d’un père de famille, fût-il le PDG d’une entreprise honnie par les Américains pour son traitement jugé à la fois trop transactionnel et peu satisfaisant des drames sanitaires.
La sympathie suscitée par Luigi Mangione, désormais inculpé de meurtre terroriste, a conduit à l’ouverture des paris. Au grand dam d’une certaine opinion réprobatrice. Prise dans la controverse, Kalshi a rapidement suspendu les échanges deux jours plus tard, évoquant une « notification des régulateurs ».
Une bataille réglementaire déjà perdue ?
« C’est du pur jeu de hasard. Des gens parient sur la responsabilité présumée d’une personne dans l’assassinat d’un être humain, et nous en sommes arrivés à un point où cela ne nous choque même plus« , regrette dans les colonnes de Fortune Magazine, Cantrell Dumas, directeur de la politique des dérivés chez Better Markets, un think tank financier basé à Washington.
D’après la presse outre-Atlantique, cette affaire révèle les limites du système de régulation financière américain. En effet, la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), chargée de superviser ces marchés, interdit théoriquement les contrats à terme liés aux assassinats, au terrorisme et à la guerre lorsqu’ils sont jugés contraires à l’intérêt public.
Pourtant, le processus actuel d’auto-certification permet aux plateformes de lancer de nouveaux produits sans approbation préalable de l’autorité, créant une faille largement exploitée et presque sans aucune chance d’être colmatée avec l’arrivée au pouvoir de Trump.
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